Le tueur se dirigea vers le miroir serti dans le mur par sécurité, s’en approcha jusqu’à donner l’impression de s’embrasser et se contempla le visage longuement en silence. Silvère n’aurait pu dire s’il observait son apparence extérieure ou s’il tentait d’explorer ses abysses internes. La plongée en apnée dura quelques minutes, puis son regard se teinta de défi.
- Que crois-tu savoir de moi, simple flic ?
La question, aussi directe soit-elle, ne surprit pas le policier : il s’attendait à ce que son adversaire le pousse à dévoiler son jeu.
- Je pense que pour je ne sais quelle raison, tu ne peux bander que dans la domination, lorsque tu détiens le contrôle total du rapport de force…
Pendant qu’il parlait, il guettait attentivement le moindre signe de déstabilisation de son interlocuteur. En vain. Il opta donc pour la stratégie du défi permanent.
- …vu que tu les as toutes pulvérisées, on ne peut en être certain, mais je pense que tu les as attachées, que tu as eu besoin d’installer dans leur esprit qu’elles allaient inévitablement être violées afin que tu puisses ressentir leur impuissance (et donc ton propre pouvoir). C’est seulement lorsqu’elles basculaient dans cette certitude, que tu as pu obtenir une érection que j’imagine faiblarde et laborieuse. Tu les as possédées dans l’horreur pour arriver à crachoter ta semence, alors que n’importe quel boutonneux est capable d’exploits quotidiens sur un simple catalogue de lingerie.
Ensuite, puisqu’elles représentaient l’image vivante de tes impuissances, il a fallu que tu les fasses disparaître, le plus totalement possible. Il s’agissait pour toi d’exorciser tes aberrations. D’où cet acharnement à les réduire à rien.
Le monstre avait écouté sans laisser transparaître le moindre signe. Il retourna à sa besogne contemplative un instant, puis explosa d’un rire sonore.
Le joueur noir avance son fou : échec
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